mardi 23 juillet 2013

Le parfum de la lavande...

Chaque été, depuis la parution d'un pas à pas très bien fait dans le Marie Claire Idées n° 29 de juin 98 (!) nous réalisons des fusettes de lavande, ce qui permet de parfumer les armoires et les tiroirs tout l'hiver. C'est aussi un petit cadeau apprécié, il suffira de rouler les fusettes entre les mains pour en raviver le parfum. En Provence, où cette technique est répandue depuis des générations, on les appelle aussi bouteilles, quenouilles ou fuseaux et il n'est pas rare de voir les enfants en vendre sur les marchés. (Dans certains magasins, très chics, on vous les vend près de 20 €...) . C'est amusant et très relaxant, car  la lavande a un pouvoir doublement apaisant :  il ne s'agit pas de sauter une brindille sinon vous recommencez tout ! Je connais certains bavards qui y ont perdu  leur latin...
   Il vous faut 38 brins de lavande avec de longues tiges (le nombre ne doit pas être divisible par 4 : 34, 38, 42, 46...) que vous nouez avec l'extrémité d'un ruban de 2,50 m. (Je réutilise les rubans de mes anciennes fusettes après plusieurs années).

Vous retournez les tiges sur les fleurs, une à une, en faisant bien attention de ne pas les casser (les brins doivent être fraîchement cueillis, au bout de 48 h  il vous sera impossible de réaliser cette étape, les brins étant trop secs).
  Vous commencez le tressage en prenant 2 brins à la fois et en serrant (pas trop quand même sinon vous perdriez le côté "bombé" de la fusette).

 

 Lorsque le tressage est terminé (c'est plus difficile à la fin) vous maintenez avec une pince à linge jusqu'au lendemain, car la lavande va sécher et votre tressage deviendra lâche.
  Le lendemain (plusieurs jours, c'est encore mieux) vous retendez le ruban à l'aide d'une aiguille à tricoter, vous enroulez les tiges de façon décorative  puis vous terminez avec un petit noeud.
Si vous n'avez pas sous la main le fameux  Marie Claire Idées, (ce qui peut paraître compréhensible) voici quelques photos de la réalisation. L'article en question est disponible ici car les Editions Marie Claire l'ont réédité dans un best of sur "les fleurs". Je me suis amusée à reproduire la même mise en scène !

vendredi 12 juillet 2013

Plaisirs minuscules


"C'est facile d'écosser les petits pois. Une pression du pouce sur la fente de la gousse et elle s'ouvre, docile, offerte. Quelques-unes moins mûres, sont plus réticentes - une incision de l'ongle de l'index permet alors de déchirer le vert, et de sentir la mouillure et la chair dense, juste sous la peau faussement parcheminée. Après, on fait glisser les boules d'un seul doigt. La dernière est si minuscule. Parfois, on a envie de la croquer. Ce n'est pas bon, un peu amer, mais frais comme la cuisine de onze heures, cuisine de l'eau froide, des légumes épluchés - tout près, contre l'évier, quelque carottes brillent sur un torchon, finissent de sécher. 
Alors on parle à petits coups, et là aussi la musique des mots semble venir de l'intérieur, paisible, familière. De temps en temps, on relève la tête pour regarder l'autre, à la fin d'une phrase; mais l'autre doit garder la tête penchée - c'est le code. On parle de travail, de projets, de fatigue - pas de psychologie. L'écossage des petits pois n'est pas conçu pour expliquer, mais pour suivre le cours, à léger contretemps. Il y en aurait pour cinq minutes, mais c'est bien de prolonger, d'alentir le matin, gousse à gousse, manches retroussées."


Je ne résiste pas à recopier ces lignes de Philippe Delerm auxquelles je pense à chaque fois que je me retrouve avec mon panier de petits pois à écosser. Certains auront retenu "La première gorgée de bière", moi c'est "Aider à écosser les petits pois" ! Il faut un talent inouï pour donner à une tâche aussi simple une telle sensualité...

Dans quinze ans, combien  y aura-t-il encore de sages à qui ce texte parlera, et qui sentiront les grains glisser sous leurs doigts à la lecture de ces quelques mots ? Combien auront attendu la levée des graines, les premières pousses qui s'élèvent vers le ciel, la venue des fleurs, la formation des jeunes gousses jusqu'à la récolte finale au parfum du chèvrefeuille ? C'est si simple d'acheter un sac de petits pois congelés venant tout droit du bout du monde... Séquence mélancolie. C'est si bon d'alentir le temps.